Le faux-ami
Un ami qui n'a de cesse d'envisager son ami sous la pire forme qui soit possible chez lui, en lui. Qui le referme sans cesse sur une forme qu'il peut mésestimer, mépriser, dont il peut se moquer et apporter aux autres de telle sorte qu'il s'en trouve grandit, par contraste, par preuve de finesse d'analyse puisque son image parle, par grandeur d'âme enfin d'être l'ami d'une telle horreur.
Un ami qui se sent comme Rousseau devant son clochard et son babil, son pépiement, qui assiste à un spéculaire spectacle de lui-même, et se sent parfois enchanté en étant persuadé de l'être de son ami.
Un ami dont l'ami lui reste opaque, sur lequel il ne peut que projeter des images et enfermer dans des formes et figures comme bon lui semble. Un ami qui ne sente pas son ami, qui ne puisse même pas le sentir, opacité des corps distants séparés par l'opacité : la lutte, la concurrence, la capture.
Un ami qui souhaite à son ami la mort, si ce n'est réelle, symbolique déjà pour commencer, des métaphores de mort. Peut-être même sera-t-il à son chevet.
Un ami qui n'a pas d'amitié comme d'autres n'ont pas d'amour.
Un ami qui recherche un compagnon de mort, en le tuant pourtant sans cesse. Peut-être pour se tuer lui-même.
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