samedi, août 30, 2008

Déborder la compréhension

Qu’est-ce que sentir quelqu’un ?

Le sentir est le lieu même de la compréhension : les sens. Qu’est-ce qu’entendre quelqu’un, s’entendre avec quelqu’un, goûter quelqu’un ?... Au-delà encore… Une sorte de synesthésie.

Qu’est-ce que comprendre ?

S’agit-il de cerner ? S’agit-il d’accepter ? S’agit-il d’intégrer ? S’agit-il d’être avec ?

Quel est le but — quel est le cadre — du comprendre ? Ces éléments toujours sont indissociables de la compréhension du comprendre, de son enrobage scientifique : qui cerne, accepte, intègre, est avec…

Qui je suis, moi, qui comprends telle personne ? Qu’est-ce que je fais ? Qu’est-ce qui se passe, là, où on est ?

On en sent, des gens, dans une vie. La plupart du temps ce n’est pas conscient, ce n’est pas voulu. Cela se passe de mots.

La compréhension que l’on a des autres, comme de toute chose, inanimée ou non, permet à notre trajectoire de se tracer.

Toute compréhension que je pourrais faire est limitée par ma propre trajectoire. Toute compréhension que je pourrais faire influence ma trajectoire propre. Au creux de ce dilemme, je ne suis pas conscient : je vis.

Je ne peux déporter la problématique sur la vie, et pourtant : il s’agit bien de cela.

Je vis d’autant que je ne suis pas conscient de vivre. Je vis avec les autres qu’autant que je n’ai pas la réflexivité de l’autre comme autre, de l’autre comme vivant.

J’ai l’ambition modeste de vivre et de comprendre les autres. Un paradoxe obscur. Puisque la vie s’épuise en elle-même, puisque les mots vivent de leur propre vie : comment pourraient-ils la relater, comment pourrait-elle agir sur eux ?

Comprendre, c’est être, mais je n’existe que dans l’agir qui découle de ce comprendre. Qui le comprend.

Je comprends différemment selon les personnes, selon mes propres états. Sans ouvrir au plus grand relativisme, cela introduit à mon plus grand relativisme personnel. Enervé, frappant quelqu’un, il y a encore de la compréhension à son sujet.

Ma compréhension reste dépendante de moi. Pour s’en abstraire, et sans rejoindre le point de vue de machines compréhensives (justice, sociologie, idéologies…), je ne peux que rejoindre, depuis moi-même, la subjectivité des personnes que je comprends. Dans ce mouvement — intellectuel, vital, sensitif, discursif… — s’installe une compréhension qui est à la fois texte et vie.

Cette compréhension s’inscrit dans une ligne de mire reposant sur un paradoxe : toutes ces personnes existent, en plus d’être, et toutes elles ne sont que potentiel, possibles, virtuels.

Je comprends lorsque je suis dans ce mouvement compréhensif qui interroge le virtuel. Le virtuel est notre imaginaire, le double à notre époque — phantasme, trompe-l’œil, inillustrable, aire de résolution, source et dépôt du réel. La vie est au diapason du réel, comme une membrane battante entre lui et le virtuel ; ce qui n’est pas le cas de cette prose qui s’inscrit dans le vide.

Comprendre, c’est sentir. C’est se mettre au diapason du monde pour faire vibrer cette fine membrane. Et tout travail d’écriture est nécrophile ou se grave dans le vide ; extrayant, par exemple, le virtuel, pour le déployer dans la représentation.

La vie ne s’écrit pas. Et toute sociologie ne peut qu’être un défi à ce qui ne se laisse pas dire. L’objet de la sociologie est ce qui encadre l’existence, et que l’on saisisse celle-ci depuis les interactions ou depuis la vie personnelle, cela revient au même : c’est une question d’agencement.

— Interroger des personnes sur leurs « relations sociales ». Interroger des personnes sur les objets auxquels elles tiennent. Points d’entrée dans l’univers de leur vie, entre le réel et le virtuel, la main sur leur existence, leur vie, cette petite membrane qui bat et dont les échos résonnent dans le monde entier, l’univers dont le battement, imprimant en retour sa marque sur tous les battements particuliers, est la conjonction, désordonnée, chaotique — un pur bruit — de tous ceux-ci. Un pur bruit qui ne se laisse jamais entendre car tous, nous sommes l’un de ces battements.

lundi, août 25, 2008

Sub specie cottidianae vitae

J’ai marché la moitié de l’après-midi, faisant le grand tour du parc de la Tête d’Or, le tour du zoo, en commençant par les girafes et les zébus qui galéraient pour trouver un peu d’ombre, foutus au pilori d’un mur de bois devant le regard voyeur des visiteurs. J’ai cherché les serpents, aussi, mais il n’y en a plus.


Je me suis allongé dans la pelouse, devant le soleil et de gros nuages noirs et une belle lumière sur les arbres et la grille noire et dorée et la statue et je n’avais pas mon appareil photo, et j’ai « lu comme on regarde un film » pendant 40 ou 50 pages.


Je n’en voulais plus au monde, aux autres et à moi-même, j’étais réconcilié avec tout ça, sans peur ni exigence, sans haine ni impatience.


Simplement seul, détendu, prêt à aimer et être aimé, en route vers je ne sais où.



@ pardon à ceux que j’ai gavé ces derniers jours.

dimanche, août 24, 2008

Sombre

J’ai juste envie de crever. De vivre un peu.

De rester là devant cet ordi de malheur. Rapport à l’hypermédia. Un peu toi.

De rester là en tension, en dépression, pierre lourde tombant au fond de l’eau. De l’eau de nuit.

Je suis toujours triste face à l’ordi. Quand il n’y a personne. Jamais personne.



Tristesse, pseudo-tristesse, pseudo-tout.

Un passage, une tension, une ligne se continuant, j’ai opté

Pour être tout, errant, ce que je suis maintenant

A cet instant où ce que je veux ne m’est pas accordé.



Je suis Idiot et c’est moi qui choisis,

Attendant,

Je ne laisse pas de prises.

Je ne peux vivre que dans ma seule mobilité. Personne ne me recueille.

Et moi non plus.



Mon cœur ne parle que peu.

Il bat souvent trop vite, et voilà tout.

Je n’aime pas l’entendre, et je crains, qu’elle vienne s’y coller.

Mon cœur n’aime personne. Il aimerait juste ne pas mourir trop jeune. Et moi j’aime quand il s’efface.

Ce n’est pas mon cœur, qui l’aime.

C’est tout le reste.



Loin des écrans, quand je suis avec elle,

Je m’efface.



J’ai juste envie d’aimer. Mourir, un peu.

D’être là pour rien du tout. Un rapport à la peau. Un peu toi.

D’être là dans le cosmos, en peau à peau, un petit corps sentant plongé dans l’univers. Ver de nuit.

Souvent là commence la vie, dans la nuit. Et se finit. Toi ici.

Sergvolant presents : la sublimation d'une pause repas d'un play-la-machine

Ce midi, à 14 heures 30, j’étais en pause repas, et le temps d’avaler un sandwich-machine fade et trop mou, j’allais manger un vrai sandwich à l’entrée du parc, que je longeai par la route dans l’espoir vite démenti de croiser un bus pour gagner quelque temps comme on gagne quelque argent, puisqu’il est dit que l’argent c’est du temps ; salaud de sandwich à frites qui m’a fait vider des litres de flotte après pour me débarrasser de leur sel.

Je passe devant le musée d’art contemporain, le MAC Lyon, le MOCA Lyon, l’affiche pour Kendall Geers, abandonnant mes hordes de collègues à leur codemaster, leur ordi, leur souris, leurs sourires, vint le moment de tension m’arrêté-je devant Interpol, m’arrêté-je pas, le bus, puis non, je continue, soudain —

Une explosion ravagea, mais un peu plus tard en fait, c’est mieux, le bâtiment des super flics, spider men des réseaux bleu prison, le drapeau qui flotte devant et son architecture pas trop trop rococo. Ça passe aux infos, à la radio, partout, Dieu qu’il y a toute la famille, enfin certain plutôt, qui se dit Mon Dieu l’autre il bosse à la Cité Internationale, ils ont dit ça, la Cité Internationale, qu’il y bosse jusqu’à 21 heures, et qu’eux on se demande comment ils ont chopé l’info alors qu’ils vaquaient à leurs occupations d’un samedi d’août après-midi ; au moment du 11 septembre aussi, je n’avais vraiment rien à faire en plein après-midi devant la télévision.

Voilà qu’on m’appelle, que je réponds placidement. Salut ça va ? On m’interrogea plus tard, Oui j’ai entendu un boom, j’ai fait ha merde, puis je me suis dit qu’à gauche ça devait à peu près être par là, alors j’ai fait putain de bordel de merde. Quelque part je cours super vite, mais c’est pas raconté, faut quand même pas exagérer, d’ailleurs idéalement il y a un bus qui m’emmène à ce moment-là

Tout n’est pas drôle alors je change la donne plusieurs fois, même que je ne me rappelle plus de grand-chose. C’est plein de décombres et d’un caméraman. Un appel arrive alors que je venais de dire à des collègues que j’aime bien de pas trop crever, dans des élans de mélodrame de série américaine d’après-midi d’il y a quelques années, des films de Bruce Willis, tellement qu’il fallait qu’un appel arrive, et je réponds bien sûr. SFR bonjour Sergueï à votre écoute. Mhh mhh mhh gnagnagna rhataki arschouille pff. Très bien monsieur donc vous souhaitez bénéficier d’un renouvellement de mobile pour le Nokia N95 8 gigas à un tarif frôlant le zéro sous prétexte que vous avez 5000 pauvres petits points carré rouge et que vous réglez vos factures depuis 5 ans. Souhaitez-vous avec ceci un ordinateur portable, les clés du coffre et un reliquat de la dernière épilation de Lady Diana ? Je vais vous demander de rappeler, monsieur, parce que là je sais pas si vous êtes au courant, bien que ce soit moins important qu’un Nokia N95, mais des plaisantins ont truffé Interpol de pétards un peu secs, ce qui fait que je suis en maintenance informatique, et que le service est en grande partie en maintenance humaine aussi, en fait mes collègues sont passablement morts, enfin à ce moment de l’histoire peut-être ceux que j’aime pas, dont je me fous, connais pas, les autres étant un peu tremblants. D’ailleurs monsieur je vois une caméra, nous passons peut-être à la télévision, regardez monsieur je vous fait coucou : coucou !

Je dis à ceux que je connais de pas mourir, j’essaie. Y’a les jumeaux, y’a D., y’a F., y’a A. un peu plus loin, F. finit aussi par être par là, j’avais oublié qu’elle était à l’étage au-dessus et que ça ne compte plus trop. C’est plein de moment très chiants, très beaux aussi, faut aimer le genre : Dis à ma famille que je l’aime, Tu lui diras toi-même (fais coucou à la caméra !). Bien sûr y’en a qui meurent, comme F., la deuxième, qui en fait n’était pas là ce jour j’ai appris ça plus tard, dans un éclat de rire déclenché par je ne sais plus laquelle de mes feintes.

Des discours. Plein de discours. Un discours sur chacun, quelques mots sur leur devenir, leurs désirs, leur vie future peut-être. D. qui n’inscrira pas le but vainqueur du Gabon en finale de la CAN, les jumeaux je n’y ai pas pensé ils ont pas du mourir, les autres je ne sais pas, j’ai juste pensé pour F. et je n’ai rien trouvé. En tous les cas je ne cours plus dans tous les sens, aussi drôle qu’impliqué dans mon rôle de survivant, au moins autant que dans un appel ; non mais j’accepte le rôle de survivant, de témoin, vous savez je ne pense pas qu’on doit tous crever non plus, il en faut pour témoigner de ce qui s’est passé.

A la presque fin je n’en peux plus, la plupart ont été emmenés par les pompiers, que mon agitation a dévié de leur trajectoire vers des inconnus vers les connus, les autres sont morts, et je sors du cercle des décombres en hurlant, pleurant, et je m’attaque en le traitant de terroriste de l’image affectuelle au journaliste qui traîne encore par là avec sa caméra, à l’écran on voit l’image qui tourne, sur quand même pas mal de mètres, belle technique de respiration de ma part, avant de finir dans l’herbe.

A la fin de cette histoire au début de laquelle je m’étais dit que je n’avais jamais laissé sur place que mon casque au petit micro, je suis un prêtre, enfin, plutôt moi-même, qui commence à dire, puis chanter, un discours de clap de fin sur un rythme naturel, qui se trouve être hip hop, ce qui part légèrement en gospel, avec un refrain que les participants peuvent chanter également, même que certains se mettent à faire les bruitages musicaux. Tout ça se termine bien, c’est très beau, c’est très parfait. J’avais terminé mon sandwich sans un instant penser à moi-même, ahah, mon cœur, le paysage qui m’entoure dans lequel je ne me sens pas en confiance à m’en sentir distant, sans fumer, sans manque ni besoin, ahah, balançant dans mon imaginaire de la pause repas ce que d’autres se foutent devant les yeux le soir sans vraiment s’en cacher, l’ersatz phantasmatique de vie de ceux qui n’en ont pas. De la culture, quoi. (Qui remarquez-le, featuring déji Marxou, ne peut qu’être le fait des travailleurs.)

La journée sinon s’est bien passée. J’ai fait des deux heures d’affilée sans crever d’envie de pause, je n’avais pas eu envie de détester tout le monde, je n’ai raccroché qu’à l’une gueule de client, le genre qui ne veut rien entendre ben moi je ne l’écoute plus, il n’a qu’à pas disposer que des impossibilités autour de son cas, et le plus difficile de la journée a terminé en me demandant mon nom et mon mail chez SFR pour m’envoyer des fleurs et surtout que ça se sache (je m’en fous remarquez j’ai aidé des collègues à pas mourir, alors même si tout le monde se fout du profil banlieusard bac +2, à part peut-être Nico allez donc bien savoir, c’était quand même chouette, de passer à la télé et que des cinéastes s’inspirent de mon personnage après, et vous pouvez rien dire parce que c’était plus drôle que là d’abord). Moi je dis : mon meilleur ami c’est le client, le reste n’est qu’une rigolade ; le travail également.

Et si ce n’est dans le soir, quelques blancs m’emmenant dans des trous noirs ; comme une recherche de proximité enfin avec le bien distant, sans joie ni dynamisme, qu’un pseudo-recul mains sur oreilles bouche hurlante pour ne pas accepter la faiblesse (tu te rappelles, dis, le tact, l’écoute, la grâce ?) d’un cœur ouvert, d’une envie d’affection, près d’une pierre froide et d’un couteau caché ; mais je crois que les ponts sur le Rhône ne sont pas assez haut. (Et l’explosion d’Interpol ? ah ben non, merde alors.)

vendredi, août 08, 2008

Tension chui 1 bade boï

Buzzday

Triple huit !

My gosh, quelle perfection !

Triple loops, des danses éclatantes.

Once in da life, jusqu’en 88. Tout le monde sait que le 7 est le chiffre divin, mais alors, le 8 !

Quelle idée d’un jour pareil pour passer le quart de siècle… La conjonction des planètes, c’est sûr ! Zorroscope, la paire de Lotto, tout y passe.

Et moi aussi, j’y passe. Avec un sourire et un pas de danse béotien dans le métro. Your smile is shining et le soleil chauffe.

Chaque année, la sublimationniversion.

Sing on da phone, sing on da phone, au triple lasso du temps, un quart de litre de vin.

Youpi youpi i/ja, et youpi youpi tanz ! Tes yeux regardent le monde comme je regarde dehors.

Vacance du temps, mes amis ! Suspension de l’über-divination !

2226 ans qu’Hannibal traversait le Rhône, 94 ans que les franco-britanniens débarquaient au Togo.

20 ans pour la Dolto, et 7 pour Léotard, et l’ami Nietzsche, et Ovidie, et puis Eve Angeli !

C’est qui ?

25 8 8 — Ops Ops Ops !

— Non mais un triple huit ! Et puis quoi encore ? Des cheveux blancs ?


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